Intervention sur l’exposé de M. de Certeau : « ce que freud fait de l’histoire. Note à propos de : « Une névrose démoniaque au XVIIe siècle », Congrès de Strasbourg, le 12 octobre 1968 après-midi, publié dans Lettres de L’école Freudienne 1969 n° 7 page 84.

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Discussion :

 

J. Lacan. – Il est tout à fait frappant de voir dans Freud le polymorphisme de ce qui concerne ce rapport au père. Tout le monde a l’air de dire que le mythe d’Œdipe, cela va de soi ; moi, je demande à voir. La névrose démoniaque est là-dessus très importante. La possession au dix-septième siècle est à comprendre dans un certain contexte concernant le père qui touche les structures les plus profondes. Mais la question que vous nous posez est de savoir où est maintenant cette chose. Je crois qu’à notre époque, la trace, la cicatrice de l’évaporation du père, c’est ce que nous pourrions mettre sous la rubrique et le titre général de la ségrégation. Nous croyons que l’universalisme, la communication de notre civilisation homogénéise les rapports entre les hommes. Je pense au contraire que ce qui caractérise notre siècle, et nous ne pouvons pas ne pas nous en apercevoir, c’est une ségrégation ramifiée, renforcée, se recoupant à tous les niveaux, qui ne fait que multiplier les barrières, rendant compte de la stérilité étonnante de tout ce qui peut se passer dans tout un champ ; je crois que c’est là qu’il faut voir le nerf de la question que vous avez soulevée.