Le 7èmeCongrès est ouvert à 14 heures par le Docteur Jacques Lacan à Rome. Paru dans les Lettres de l’École freudienne, 1975, n° 16, pp. 27-28.

 

(27)j. lacan – Je dis quelques mots d’ouverture parce qu’on me l’a demandé. Je les ferai brefs, j’espère.

On est convenu d’appeler succès le brouhaha, c’est-à-dire ce qui fait foule. On est convenu de ça dans le public. Mais pour nous autres analystes, ce succès-là n’a rien à faire avec ce qui nous intéresse ; et ce succès-là est quelque chose de tout à fait autre que ce qui serait le nôtre, je veux dire celui à quoi nous nous référons quand nous parlons de ce que nous sommes faits pour enregistrer, à savoir l’échec. L’échec, c’est ce que nous opposons au succès. Mais le succès qu’ainsi nous supposons – nous sommes bien forcés de le supposer, puisque ce qui nous caractérise, c’est le plus souvent l’échec, là-dessus, nous en savons un bout – ce succès-là donc, qui est notre pôle supposé en tant que nous partons de l’échec, ce succès-là n’a rien à faire avec aucun succès, succès comme ça : un attroupement.

Le succès, pour nous, ça se limite à ce que j’appellerai le résultat. Je dois dire que là-dessus, des résultats, ceux qui comptent, j’en ai enregistrés, et même tout fraîchement. Il est arrivé qu’on me remette – j’ai reçu, je ne sais pas si l’auteur en est présent, sur l’écriture et la psychanalyse un magnifique travail. C’est d’un auteur qui habite dans le midi de la France. Et à cause de ça, il (28)n’obtient de ce que j’enseigne que des échos. Il ne peut pas être là tout le temps quand je parle. Alors il y a quelque part une toute petite chose à côté de la plaque, ce qui m’assure donc que le reste est bien de son cru ; ce qui est à côté de la plaque, c’est la façon dont un tout petit peu il me cite à côté. Mais ce qu’il a fait, c’est vraiment excellent. Il est, si je puis dire, dans le vent ; le vent dont il s’agit n’a rien à faire avec le fait que vous me fassiez un succès. Il serait convenable, bien sûr, que je vous en remercie, mais après tout, pourquoi est-ce que vous ne vous en remercieriez pas vous-mêmes ? Le rôle du message, c’est d’être reçu sous une forme inversée, et quand on dit à quelqu’un « pauvre chou » c’est toujours soi qu’on plaint. Alors remerciez-vous !

Le vent dont il s’agit, ce vent forcément qui, je dois dire, ne me déplaît pas, c’est celui dont je me trouve pour l’instant, grâce au succès, un peu chargé. Mais, comme je vous l’ai dit, ça donne des résultats, des résultats positifs quand une chose se tient, comme cet écrit que je viens de citer et dont je m’emploierai à ce qu’il se publie quelque part, j’espère dans ma revue. Le vent dont il s’agit, je sais en être responsable. Ce que j’apprécie avant tout dans ceux qui veulent bien gonfler leur voile de ce vent, c’est la façon dont ils l’attrapent, c’est l’authenticité de leur navigation. J’espère, je suis sûr même pour le savoir déjà, que vous en aurez ici des témoignages.

Nous allons commencer aujourd’hui par ce qui en fait l’objet, à savoir ce séminaire sur le réel, dont vous savez je suppose, au moins pour certains, que c’est une des catégories auxquelles je me réfère. Solange Faladé qui est là, qui est une des majeures à savoir prendre ce vent, va présider cette séance et la diriger jusqu’à son terme.