Journées des cartels de l’École freudienne de Paris. Maison de la chimie, Paris. Parues dans les Lettres de l’École freudienne, 1976, n°18, pp. 219-229.

(La séance est ouverte à 17 heures sous la présidence de M. Martin)

(219)Pierre Martin – Ces journées d’étude des cartels de l’École freudienne n’avaient pas uniquement pour but la réunion et l’assemblée nombreuse qu’ils ont suscitées ; elles avaient aussi dans leur projet de permettre et même de susciter un débat sur la fonction des cartels dans l’École, comme tels.

Il est en effet intéressant, parfois à la limite, un petit peu inquiétant, de constater comment ces cartels, la plupart du temps se sont constitués.

Le cartel, dans la perspective de l’École freudienne, n’est pas une réunion de gens qui se proposent simplement une rencontre d’échanges d’idées, bien moins encore un lieu d’enseignement direct ou magistral, dans un petit groupe, dans un groupe plus ou moins étendu.

Ce qui concerne le cartel est défini très expressément et d’une façon très nette dans l’Acte de fondation de l’École, acte de fondation qui date de 1964, il a onze ans. Ce que nous nous proposons de susciter chez vous, c’est en quelque sorte de ressusciter un texte et ses implications qui demeurent, il faut le reconnaître, tout à fait sous le voile.

Un cartel, dit le texte, est d’abord la condition d’admission à l’École ; il le dit dans les termes que voici :

Ceux qui viendront dans cette École s’engageront à remplir une tâche soumise à un contrôle interne et externe ; ils sont assurés en cet échange que rien ne sera épargné pour que tout ce qu’ils feront de valable ait le retentissement qu’il mérite et à la place qui conviendra.

Pour l’exécution de ce travail nous adopterons le principe d’une élaboration soutenue dans un petit groupe ; chacun d’eux (nous avons un nom pour désigner ces groupes) se composera de trois personnes au moins, de cinq au plus – quatre est la juste mesure. PLUS UNE chargée de la sélection de la discussion et de l’issue à réserver au travail de chacun.

Je vous relis là un passage que je complèterai de deux ou trois autres ; mais pourquoi, diable, est-ce que je vous le relis ?

Tout le monde a ou est censé avoir en main l’annuaire de l’École ; même s’il est daté (et jusqu’à ces prochains jours) de 1971, il comporte l’Acte de Fondation.

Or, c’est un fait que ce n’est pas dans cet esprit, je crois, ou plutôt dans cette forme, que la plupart des cartels dont j’ai connaissance se constituent et agissent.

L’École freudienne de Paris – dit Lacan – dans son intention représente l’organisme où doit s’accomplir un travail qui, dans le champ que Freud a ouvert restaure le soc tranchant de sa vérité.

(220)1.– qui ramène la praxis originale qu’il a instituée sous le nom de psychanalyse, dans le devoir qui lui revient en notre monde ;

2. Qui, par une critique assidue, dénonce les déviations et les compromissions qui amortissent son progrès en dégradant son emploi ;

3. À ces trois perspectives correspond dans l’Acte de fondation la création de trois sections, l’une de Psychanalyse pure, l’autre de Psychanalyse appliquée, la troisième de Recensement du champ freudien. Chacune assistée d’un directoire de section chargé de colliger les travaux faits, de veiller aux voies les plus propices à soutenir les effets de leur sollicitation et donc d’assurer aussi les échanges entre les cartels, chose qui, je crois que tout le monde en sera d’accord, n’est pas des plus répandues.

Bien sûr notre réunion aujourd’hui avait cela pour but au départ, encore faudrait-il essayer de discuter comment la chose peut se faire.

Et pour en conclure avant que le débat ne soit ouvert et que chacun puisse s’exprimer, je vous dis deux choses.

La première est qu’il y aura demain une autre salle ouverte à côté de celle-ci, demain matin, où justement ceux qui désireront discuter sur ce thème de ce qu’est un cartel et de comment il pourrait fonctionner dans les perspectives ouvertes par l’Acte de fondation pourront se retrouver.

La deuxième est que, après avoir discuté avec beaucoup de collègues, de gens faisant partie de cartels je me suis avisé de leur poser, comme ça la question suivante : quelle place avez-vous donnée dans la création et l’organisation de votre groupe de travail à ce petit mot : « plus une » ?

Il ne s’agit pas d’ « un en plus », de trois plus un qui fait quatre, de quatre plus un qui ferait cinq, c’est : « plus une » ; il y a là quelque chose qui a été, j’en suis bien convaincu ainsi placé pour éveiller toute une problématique ; étant entendu, comme il est dit dans le texte (je ne veux pas vous assommer avec des lectures de ce texte, vous l’avez tous, il n’y a qu’à le lire) mais étant entendu que toute chefferie et toute direction au sens d’attitude magistrale de l’un des éléments d’un cartel est exclue de départ.

Ceci étant bien dit, ce qui serait souhaitable, c’est que dès maintenant, quelques-uns parmi vous, les plus nombreux possible, nous fassent connaître ce qu’ils entendent par un cartel en prenant bien sûr pour départ ce qu’eux-mêmes ont constitué, s’ils ont constitué quelque chose et que d’autre part, ils n’oublient pas là-dedans de répondre à cette question du : « plus une ».

Mais n’attendez pas de moi que je vous renvoie d’une manière abrupte une définition du « plus une ».

C’est justement cela qu’il faudrait soutenir comme base de la discussion de vos interventions.

 

Jacques Lacan – C’est certainement à juste titre que Martin intervient sur ce point.

Je veux dire que ce « plus une » aurait mérité un meilleur sort puisqu’à ma connaissance il ne semble pas que cette chose qui vraiment, je ne veux pas me targuer d’avoir là-dedans anticipé sur quelque chose que j’essaie d’articuler sous la forme du nœud borroméen. On ne peut pas ne pas reconnaître dans ce « plus une » le quelque chose que je ne vous ai pas dit évidemment la dernière fois parce que je ne peux pas arriver à un séminaire toujours à dire tout ce que je vous avais apporté mais enfin qui se réfère strictement à ce que j’aurais écrit que le X + 1 c’est très précisément ce qui définit le nœud borroméen, à partir de ceci que c’est à retirer cet 1 qui dans le nœud borroméen est quelconque, qu’on en obtient l’individualisation complète, c’est-à-dire que de ce qui reste – à savoir du X en question – il n’y a plus que de l’un par un.

La question que vous pose en somme Martin, c’est d’opiner sur ce que – je ne dis pas que vous vous y soyez intéressés jusqu’à présent mais ce n’est pas une raison pour qu’on ne tire pas de (221)vous quelque réponse – ce un, ce un qui se trouve être toujours possible comme nouant toute la chaîne individuelle, comment le concevoir ?

Il est certain que j’avais dit des choses sur ce que Martin vient d’évoquer, à savoir l’ « un en plus ». Je ne l’avais abordé à l’époque que sous la forme de ce qui constitue à proprement parler le sujet, qui est toujours un « un en plus ».

J’aimerais que se déclare qui voudra bien puisqu’il est certain que je ne peux pas interroger chaque personne et transformer cela en réponse obligatoire. Du moins que se déclarent les personnes qui voudront sur ce thème, à savoir en somme ce que lui évoque, ce que ça suggère pour lui cette « personne » que je prends soin en quelque sorte d’isoler du groupe, mais ce qui ne veut pas dire pour autant que ça ne peut pas être n’importe laquelle.

Il est certain que le cartel ce n’est que peu à peu que ça a fait son chemin dans l’École, on a fait des groupes, des séminaires ; ce qui constitue la vie propre d’un cartel a vraiment le plus étroit rapport avec ce que j’essaie d’articuler pour l’instant dans le séminaire.

Moi, je sais ce que je voudrais obtenir comme fonctionnement des cartels ; si je lui ai donné cette portée limitée en disant que trois à cinq ça fait donc au maximum six ; ça doit bien avoir une raison. Ce n’est pas quand même une énigme.

Ça devrait normalement suggérer au moins à certains, à ceux qui ont le plus de pratique, une réponse, ce n’est pas du tout que j’en sois sûr, mais enfin il y a quelque chose de contenu dans ce mot : cartel, qui déjà lui-même évoque quatre, c’est-à-dire que le trois plus un, c’est bien tout de même ce que je considérerais comme permettant d’élucider son fonctionnement, et qu’on puisse aller jusqu’à six, il faudrait que d’abord la chose soit mise à l’épreuve ; j’ai employé le mot cartel mais, en réalité c’est le mot Cardo qui est derrière c’est-à-dire le mot gond, je l’avais avancé ce mot Cardo, mais bien sûr en faisant confiance à chacun pour y voir ce qu’il veut dire. J’ai préféré finalement le mot cartel parce qu’en même temps c’était une précision et que l’illustration que j’en donnais tout de suite en parlant au minimum de « trois plus un » aurait permis d’attendre un jeu efficace et de faire non seulement qu’il y en ait plus mais qu’il y en ait qui jouent leur rôle non pas seulement dans une des sections que je prévoyais qui se trouvaient être trois aussi, ça vaudrait de s’apercevoir qu’en faisant trois sections ça implique aussi une « plus une » à savoir une quatrième.

Ça veut dire que l’École n’a peut-être pas encore réellement commencé à fonctionner. Ça peut se dire, pourquoi pas ?

De sorte que maintenant j’attendrais que quelqu’un déclare, s’il voulait bien je lui en serais reconnaissant très personnellement, que quelqu’un déclare comment, pour peu qu’il y ait pensé – après tout, il y a peut-être quelques personnes qui ont lu l’Acte de fondation – comment pour peu qu’il y ait pensé, ce « plus une » est pour lui, disons, interprétable. Interprétable, bien sûr, en fonction de mon enseignement.

Colette Soler, vous que j’ai été entendre tout à l’heure et qui m’avez donné bien du plaisir, pourquoi est-ce que vous n’y avez jamais pensé ?

 

Colette Soler – J’y ai pensé.

 

Jacques Lacan – Vous y avez pensé, alors dites ce que vous avez pensé.

 

Colette Soler – Je dis que j’y ai pensé mais que je n’ai pas, pour autant, grand chose à en dire, parce que dans le cartel où j’ai travaillé nous avons démarré à quatre. Au départ j’aurais plutôt dit que c’est ce que vous appeliez un groupe ; nous sommes maintenant cinq, mais la question que je me suis posée c’est qu’au fond le « plus une » ce n’est peut-être pas forcément une personne, d’une part, et puis pas forcément qui est là.

(222)À mon avis, dans notre cartel, l’élément qui faisait peut-être le joint c’était l’idée qu’on était rattaché à l’École, par le biais du cartel ou peut-être à votre nom, je ne sais pas. Mais je ne vois pas au niveau d’une personne qui aurait eu un rôle dans le groupe, là, du « plus un ».

 

Maurice Alfandari – Ce que m’évoque le « plus un » à propos des cartels, c’était un cartel clinique, (on ne savait pas très bien comment l’intituler, c’est comme cela qu’on l’appelait). Le « plus un », en effet je rejoindrai ce qui a été dit, ça ne représentait pas une personne. Mais maintenant que j’y repense, j’ai l’impression que ça représentait une espèce de place vide, une fonction qui était interchangeable et qui a permis que quelque chose se produise, qu’en tout cas pour ma part je ne pouvais pas faire seul, il m’était impossible… ce que j’ai essayé de faire je ne pouvais pas le faire seul.

Je ne sais pas très bien comment mais c’est par ce groupe (on est cinq je crois) que je comprends ça comme ça, le « plus quelque chose » c’est une place qui est vide et qui rend possible le fonctionnement du groupe et de ce qui s’y élabore, mais sans nécessairement qu’on cerne ou qu’on repère quand ça s’est produit parce qu’il y a des alternances, des commutations, des choses comme ça.

 

Jacques Lacan – Qu’est-ce qui remplit ce rôle à votre idée, dans votre groupe ?

 

Maurice Alfandari – Je ne sais pas. Je pense que c’est parce que je ne le sais pas que ça fonctionne.

 

Jacques Lacan – Oui… (Rires)

Parce que vous avez épinglé ce groupe du terme de cartel clinique… Est-ce que c’est la clinique, est-ce que c’est par exemple votre expérience commune qui joue là un rôle nouant ?

 

Maurice Alfandari – Oui, probablement, mais ce que je pense – c’est comme ça que je comprends le « plus un » dont vous parlez – c’est le fait que moi et, je pense, les autres aussi, dans l’élaboration de ce que nous faisons, de ce que nous essayons de faire, je crois que ce serait impossible s’il n’y avait pas quelqu’un (mais ça ne désigne pas une personne) qui alternativement remplit la fonction du « plus un ». J’aurais tendance à dire : la fonction de l’absent, fonction remplie en alternance par je crois les uns et les autres.

 

Jacques Lacan – Est-ce qu’il peut y avoir remplissement de cette fonction de l’absent par quelqu’un qui, ce jour-là est absent par exemple ?

 

Maurice Alfandari – Oui, je pense.

 

Jacques Lacan – Alors, quel est le rapport, y avez-vous pensé, quel est le rapport de celui qui ce jour-là est absent avec ce que j’évoquais à l’instant comme suggestion, suggestion passagère, quel est le rapport de cet absent avec ce que nous pourrions appeler là l’objet en tant que la clinique le définit ?

 

Maurice Alfandari – C’est peut-être justement parce qu’il est absent que quelque chose est possible.

 

Jacques Lacan – La suggestion, d’où qu’elle soit venue, la suggestion de la fonction de l’absent, c’est dans votre énoncé qu’elle a surgi, n’est-ce pas, la fonction de l’absent qu’on peut dire être l’absent momentanément, l’absent à une réunion du cartel, ce n’est jamais en vain que quelqu’un est absent, on tend toujours à donner une portée à l’absence dans l’analyse nous y sommes habitués. Pensez-y, est-ce que c’est un support possible de ce « plus une personne » dont j’ai indiqué non pas l’absence mais justement la présence, parce qu’il n’y a pas trace de signal par l’absence dans mon « plus une » du texte, mais pourquoi ne pas, là-dessus, (223)s’interroger ; il y a peut-être un certain biais par où cette personne peut se focaliser dans la personne absente, votre expérience d’un cartel peut vous suggérer là-dessus une réponse. Laissons le temps à Monsieur d’y penser.

 

Pierre Kahn – L’expérience dont je peux faire état est celle-ci : l’expérience d’un cartel non pas clinique mais dit de formation théorique, c’est-à-dire de lecture de textes. Ce cartel fonctionnait du point de vue du nombre, dans ce qui a été rappelé par Martin et du point de vue de sa façon de travailler. Je crois qu’une des choses qui présidait c’était la prise en considération de quelque chose que vous avez dit dans le séminaire sur les écrits techniques, à savoir commenter un texte analytique c’est comme faire une analyse, et bien que les participants de ce cartel ne se soient pas concertés quant au sens à donner à cette formulation, elle était présente dans leur esprit, chacun à sa façon, certainement. Alors qu’est-ce que cela veut dire, par rapport à la question posée du « plus une » ?

Je signale tout de suite que de « plus une », une personne en plus, il n’y en avait pas.

Il n’y en avait pas de présente, mais d’imaginairement présente il y en avait. Je ne peux pas parler à la place de mes collègues, mais pour ce qui me concerne, cette personne présente en plus, elle était là et diversement, selon les occasions, cela pouvait être – à tout seigneur tout honneur – vous-même par moment, ça pouvait être l’analyste avec qui je suis en contrôle, ça pouvait être mon analyste, ça pouvait être un de mes patients, je crois pouvoir dire qu’il y a toujours eu, imaginairernent parlant, une « plus une ».

 

Jacques Lacan – Est-ce que c’était une « plus une » qui changeait si l’on peut dire ; Je veux dire : est-ce que c’était par exemple une « plus une » différente dans les déclarations de chacun ? C’est-à-dire que, puisque c’était un séminaire que vous avez épinglé vous-même de la formation théorique, est-ce que le discours de chacun amenait à tour de rôle une « plus une » différente ?

Une personne qualifiable de la « plus une personne » à chaque fois différente puisque vous avez évoqué par exemple pour ce qui est de votre expérience, dont, après tout, vous pouvez témoigner, puisque vous, vous saviez la personne que vous aviez en tête, vous en avez énuméré un certain nombre, je pense qu’il y avait de temps en temps Freud, puisqu’il s’agissait de formation théorique, vous ne l’avez pas nommé, bien sûr, je vous comprends, votre contrôleur aussi ou quelqu’autre personne, est-ce que vous aviez le sentiment que dans le discours des autres c’était pareil ? Je dirais que le discours des autres tournait autour d’un pivot non pressant, est-ce que c’était sous cette forme-là que le « plus une » en question se présentait ?

 

Pierre Kahn – Oui, je peux dire oui, peut-être hâtivement, puisque je parle à leur place, ça me paraît, dans la structure qui était en place, évident. Mais ce que je voudrais ajouter c’est ceci, c’est pourquoi je dis que ça me paraît évident, c’est que les gens qui étaient là, en présence, s’efforçaient à ceci : c’est que dans ce travail de lecture et de commentaire au sens que j’ai rappelé tout à l’heure, ils s’efforçaient d’atteindre à ce qu’on pourrait appeler en reprenant votre expression une parole pleine, et par conséquent il est tout à fait évident que au-delà des interlocuteurs physiquement présents avec qui ils discutaient, ils s’adressaient à quelqu’un. Ce travail donc se faisait avec quelque chose qui me semble-t-il, en faisait le prix pour une part, c’était que les gens en présence, ne cachaient pas trop ce qui pouvait être impliqué de leur position subjective par rapport au texte qu’ils étaient en train d’étudier. Que ce soit un texte de vous, un texte de Freud, puisque vous le nommiez tout à l’heure, etc.

La question que je me pose à la suite de ce que Martin nous a lancé tout à l’heure c’est la suivante, ce travail qui a été pour moi satisfaisant, quelle différence y aurait été introduite si la « plus une » qui était là imaginairement avait été non pas une personne imaginaire mais une personne réelle.

Sans pouvoir beaucoup avancer là-dessus je veux simplement dire ma conviction qu’il y aurait (224)certainement eu un infléchissement dans le travail, si la personne « plus une » avait été autre chose que cette personne imaginaire que chacun mettait, certainement.

Différente du côté d’un resserrement de ce qui était l’objectif visé dans ce travail et que j’ai appelé d’une manière commode à l’instant, atteindre, avec tous les balbutiements que cela peut comporter, à une parole pleine.

 

Jacques Lacan – Monsieur Alfandari, dites-moi ce que ça vous suggère ce que vient de dire Pierre Kahn ?

Peut-être avez-vous pensé au fonctionnement effectif du cartel, ça me semble être un point tout à fait capital pour donner si je puis dire un style analytique aux réunions d’un cartel, parce que ce « plus un » il est toujours réalisé, il y a toujours quelqu’un qui dans un groupe, au moins pour un moment, c’est déjà heureux quand la balle passe, qu’au moins pour un moment on tient la balle, et dans un groupe, surtout un groupe petit comme ça, habituellement, c’est le cas de le dire, c’est un habitus, habituellement c’est toujours le même et c’est à ça qu’on se résout sans en mesurer les conséquences, je dirais que tout le monde est très heureux qu’il y en ait un qui fasse ce qu’on appelle comme ça couramment le leader, celui qui conduit, le Führer.

 

Maurice Alfandari – Ce qu’a dit Kahn m’évoque un peu ce que j’ai ressenti dans ce groupe ; il me semble que dans un cartel il y a deux écueils : l’un qui n’a pas suffisamment de choses en commun pour qu’il tienne et l’autre qui est une espèce d’effet imaginaire, de groupe qui bloque tout. Mais c’est maintenant que je dis ça, je n’y avais jamais tellement pensé avant, il se trouve que ce groupe est un groupe clinique mais que les mêmes personnes de ce groupe clinique se retrouvaient dans un groupe qui n’était pas du tout clinique, qui était centré sur l’étude d’autre chose, des mathématiques…

 

Jacques lacan – Vous étiez quoi ? Vous étiez un groupe déjà un peu décrassé mathématiquement si je puis dire ? Parce que c’est vrai, il faut y avoir mis le doigt pour savoir ce que c’est, je veux dire avoir eu une ébauche au moins de formation mathématique. C’est très spécial, c’est très spécifique, la formation mathématique.

 

Maurice Alfandari – C’est difficile de répondre sur le degré de crasse qu’on avait ; je crois que l’un d’entre nous était assez avancé, plus que nous ; et puis il y avait notre professeur qui lui était loin d’avoir de la crasse, notre professeur était quelqu’un qui était apte à nous entrainer dans cette voie-là, il dure depuis deux ans, ce groupe.

Donc c’était les mêmes personnes à peu près dans ce groupe théorique, mathématique et dans le groupe clinique. Celui auquel je pense c’est le groupe clinique où je crois que les effets ne sont pas, on ne peut pas les repérer très facilement, mais simplement on peut les repérer peut-être par le fait que pour moi, par exemple, rien n’était possible de mener à un certain stade d’élaboration en dehors de ce groupe. Ça m’a été impossible, mais je ne saurais pas dire à quel moment : c’est la fonction, en effet, du groupe.

 

Jacques Lacan – Quand des mathématiciens se retrouvent, il y a ce « plus une » incontestablement. À savoir que c’est vraiment tout à fait frappant, que les mathématiciens, je pourrais dire, ils ne savent pas de quoi ils parlent, mais ils savent de qui ils parlent, ils parlent de la mathématique comme étant une personne.

On peut dire jusqu’à un certain point que ce que j’appelais de mes vœux c’était le fonctionnement de groupes qui fonctionneraient comme fonctionne un groupe de mathématiciens quelconque.

 

Michel Fennetaux – J’aimerais donner mon avis parce que je travaille dans le même groupe que celui dont vient de parler Alfandari. À dire le vrai je ne m’étais jamais posé la question du « plus une » mais je peux dire ce à quoi ça me fait penser, puisqu’il en est question.

 

(225)Jacques Lacan – Ça vous fait penser quoi ?

 

Michel Fennetaux – Le « plus une » c’est d’une part l’effet du groupe, à savoir que, comme l’a dit Alfandari tout à l’heure, le fait de pouvoir retrouver périodiquement un certain nombre de personnes permet, m’a permis, d’approfondir ou de pouvoir formuler un certain nombre de choses sur mon expérience, que je n’aurais pu faire seul. Le deuxième sens que je vois actuellement à ce « plus une » c’est qu’effectivement je crois que dans ce groupe l’un d’entre nous assume souvent, probablement par son expérience plus longue, cette position de leader dont il a été parlé tout à l’heure.

Enfin, il y a un troisième sens ; ce serait plutôt de parler de « moins une » que de « plus une » qu’il faudrait, de la manière suivante :

Nous nous trouvons entre personnes qui ont entre elles une relation de confiance et qui peuvent parler de ce fait, comme l’a dit Kahn tout à l’heure, en s’impliquant assez loin dans ce qui est leur rapport à la pratique, ce « moins une » c’est au fond l’absence de superviseur, c’est-à-dire l’absence de cet effet de sidération plus ou moins qui joue dans les groupes plus importants animés par des gens dont le nom est connu dans l’École et où joue beaucoup plus que dans un petit groupe le problème de reconnaissance.

Dans un petit groupe, tel que le cartel, la demande de reconnaissance par les autres est, dans une large mesure, annulée.

C’est pourquoi le troisième sens de « plus une » c’est plutôt « moins une » que je dirais.

 

Laurence Bataille – J’ai fonctionné dans pas mal de groupes qui étaient justement pas des cartels, et je crois que cette personne qui a disons un statut différent qui n’est pas tout à fait un semblable, s’incarne toujours dans une des personnes du groupe. Mais je n’ai pas l’impression que ce soit un leader, j’ai l’impression qu’il y a une personne du groupe, c’est à lui qu’on s’adresse, c’est à lui qu’on témoigne de quelque chose et dont on attend effectivement une espèce d’approbation, c’est vrai ; mais en fait, ça ne joue pas le rôle que ça devrait jouer de produire, c’est-à-dire que ces groupes finissent toujours – enfin je dis toujours… – on a un peu l’impression que ça finit en eau de boudin chaque fois, – alors l’ « en plus » change, parce qu’on l’attend de quelqu’un d’autre. J’ai aussi éprouvé ça, ma foi, de façon tout à fait évidente et quand j’en ai parlé dans un des groupes parce que j’avais l’impression, eux aussi, qu’ils s’adressaient à une personne en particulier, qui n’était pas la même pour tous, il paraît que j’ai rêvé et imaginé qu’ils regardaient toujours par exemple la même personne quand ils parlaient.

Je dois dire que du coup on va faire un groupe et on s’est dit que cet « en plus » on pourrait peut-être le faire fonctionner en s’imposant à la fin de chaque réunion d’écrire ce qui en avait été le point vif, ne serait-ce qu’une phrase et que ça jouerait peut-être comme témoin si on peut dire et qui pousserait peut-être à ce que le travail qu’on fait avance, et ne se dilue pas dans des espèces de petites idées qui ne peuvent pas se poursuivre.

Je ne sais pas si ça peut jouer ce rôle parce qu’on doit se réunir lundi prochain pour la première fois.

 

Jacques Lacan – Je te remercie.

 

Sol Rabinovitch – Ce que je voulais dire du cartel où j’ai travaillé c’est qu’on était cinq et cinq membres qui n’ont jamais manqué ; il y a eu un sixième qui a manqué très souvent et qui a changé en plus, c’est-à-dire qu’au début c’était une personne et après c’était une autre personne, qui a toujours manqué.

Ce que je voulais dire surtout c’est que ça ne me paraît pas ça être la fonction du « un en plus » mais au contraire la fonction du « plus un » me paraît soutenue par justement les membres (226)présents et qui ne manquent jamais dans ce groupe, dans le cartel. C’est-à-dire comme une fonction qui serait celle d’un point aveugle, une fonction de méconnaissance, il y a toujours à un moment donné quelqu’un, ce n’est bien entendu jamais le même, c’est toujours quelqu’un qui est là, qui dit : Je ne comprends rien, ça ne sert à rien, on ne produit pas…

 

Jacques Lacan – C’est ça le « plus une »… ? Celui qui ne comprend rien ? Pourquoi pas. (Rires)

 

Sol Rabinovicth – C’est quelque chose comme ça mais je précise que c’est une fonction qui est parfaitement interchangeable ; c’est un rôle qui se déplace. Il faudra articuler ça au fait que le travail d’un cartel est un travail qui est analytique, donc où il y a du transfert ; c’est tout ce que je voulais dire.

 

Alain Didier-Weil – Une idée me vient sur ce « plus une », à propos de cette interrogation : pourquoi différents cartels auxquels j’ai participé n’ont pas abouti à ce à quoi nous nous estimions en droit d’attendre au début ?

Prenons l’exemple d’un cartel où on fait un commentaire de texte : on peut dire que ce qui nous réunit, dans un cas pareil, c’est qu’on est situé dans un contexte métonymique et que, dans ce contexte on a à supporter la parole d’un Autre, Freud, Lacan. Dans ce contexte métonymique qu’est-ce que va devenir l’être parlant ?

Pour la première fois, il m’apparaît que peut-être le « plus un » ce serait quelqu’un qui aurait à voir avec le passeur : le « plus un », ça pourrait être le lieu où il y a dans le schéma L le S c’est-à-dire le témoignage d’un franchissement possible de l’axe a-a’, d’un franchissement possible qui va de A à S.

Autrement dit, le « plus un » s’il occupe cette place de S, ce serait sûrement pas un sujet supposé savoir, mais un sujet qui témoignerait que ça a passé, que le message a passé, qu’il y a eu de la métaphorisation, qu’a été retrouvé, au-delà de ce qu’on reçoit comme acquis (de ces « idées reçues » que Flaubert stockait dans son dictionnaire des « idées chics »), le point brûlant d’où ce contexte métonymique a jailli d’un texte inaugural métaphorique.

Juan-David Nasio – Je partirais de l’expérience de deux cartels auxquels je participe, expériences différentes mais en tout cas, concernant ces questions de « plus un », ce « plus un » il est dans les deux cas toujours présent.

 

Jacques Lacan – Il est toujours présent mais toujours méconnu.

Et c’est ce que j’ai voulu suggérer par ce petit texte ; c’est que les analystes pourraient s’en apercevoir ; il est toujours méconnu parce que ça c’est quand même pas l’Autre de l’Autre, il est toujours présent ce « plus un », sous des formes quelconques qui peuvent être tout à fait incarnées, le cas du leader est manifeste mais des analystes pourraient s’apercevoir que dans un groupe, il y a toujours un « plus un » et régler leur attention là-dessus.

 

Juan-David Nasio – Je ne sais pas si vous serez d’accord de prendre appui dans une des formules lacaniennes les plus connues à savoir que le désir de l’homme c’est le désir de l’Autre. Le « plus un », c’est celui qui soutient dans le groupe le désir de l’Autre. Soutien du désir qui peut se faire de mille façons, en parlant, en se taisant, en prêtant sa maison pour que ça ait lieu, etc. Il y a mille manières d’être ce « plus un ».

Mais il y a une autre manière d’en rendre compte. En y réfléchissant, je pense au contenu, au contenu du cartel, c’est-à-dire, je pense au savoir de l’analyste. Le savoir de l’analyste, si est valable l’hypothèse que ce soit ce qui est en jeu dans un cartel – je parle des cartels des analystes – car il ne faut pas oublier qu’il y a aussi des cartels où il n’y a pas d’analystes, le savoir de l’analyste est un savoir partagé, mais non pas un savoir à échanger, je crois que c’est une (227)de nos formules, cette idée de partage fait référence au fait qu’il n’y a que des analystes, c’est là que je pourrais rejoindre – je ne sais pas si Alain Didier serait d’accord – son idée de la métonymie. Je parlerais plutôt de la suite sérielle ; à l’égard d’un analyste il y aura toujours un autre, un « plus un ». Qu’il y en ait deux et il y en aura un troisième. À ce moment il y aura quatre. Bref il y en aura toujours un qui viendra à être présent en plus, et cette présence-là justement je la poserai comme étant celle de celui qui soutient dans le travail du groupe le désir, le désir de l’autre.

 

Jacques Donnefort – Je voudrais prendre comme exemple ce qui s’est passé dans un groupe où on fonctionne depuis deux ans. À la rentrée, cette année une personne « en plus » est venue dans ce groupe, on s’est proposé de lui relater d’une certaine façon ce qui s’était élaboré dans ce groupe les deux années précédentes et on s’est trouvé bien embêtés dans ce fait d’avoir à rendre compte. Il nous est arrivé à ce moment-là une réflexion du type : « C’est peut-être aussi difficile que s’il fallait là, parler de sa propre analyse ».

Je dis ça parce qu’effectivement, ça nous a fait penser d’une certaine façon à la passe, curieusement ça a eu comme effet – cette personne qui est venue en plus, non pas que ce soit elle qui soit le « plus une » mais enfin qui ait pris cette fonction-là de par ce qui se jouait à ce moment-là dans ce groupe – ça a eu un effet remarquable, c’est que petit à petit, dans le groupe, dans ce qui devenait un cartel, me semble-t-il, les gens se sont mis à parler de leur analyse, de leur propre analyse et à prendre, éventuellement exemplifier quelque chose qui se disait sur un plan plus ou moins théorique – c’est un groupe qui se réunissait sur la pulsion, à exemplifier d’une certaine façon à partir de ce qui pouvait avoir été au niveau de sa propre analyse.

C’est en ce sens-là qu’on rejoint un petit peu ce qui était dit sur la fonction du passeur et d’une certaine façon aussi la présence de l’analyste, que dans ce groupe on s’est retrouvé comme ça en position d’analysant.

 

Colette Soler – Je voudrais dire quelque chose encore : au fond je ferai l’hypothèse que s’il y a toujours un « plus un » il y a peut-être intérêt à ce qu’il ne soit pas incarné dans le groupe.

Parce que quand il est incarné dans le groupe effectivement ça fonctionne sous forme qu’il y a un leader avec toutes les…

 

Jacques Lacan – Ce n’est pas certain que c’est toujours si simple…

 

Colette Soler – J’ai pensé ça à partir du cartel où j’étais ; je me suis posé très souvent la question de savoir au fond qui dans le groupe était le leader et je n’ai jamais réussi à y répondre. C’est-à-dire que je ne crois pas véritablement qu’il y avait une personne qui tenait cette position, mais par contre, qu’il y avait une référence et j’ai dit tout à l’heure qu’elle se situait à côté de votre nom ; j’ai dit nom justement pour indiquer si vous voulez que c’est pour ça que je crois que ça a marché, parce qu’un nom il ne répond pas au fond, et que c’est ce qui permet que ça fonctionne.

Georges Botvinik – C’est juste des réflexions sur le moment, on oppose effectivement le « plus un » qui serait incarné avec le problème du leader ; il me semble que ça insiste comme une difficulté pour les gens, pour moi aussi. D’autre part le « plus un » qui serait un nom ou bien je dirais plus un mot, c’est-à-dire un élément commun du discours autour duquel le groupe se groupe justement, pour travailler ; au fond un groupe se forme autour d’un mot, un thème, finalement c’est un mot qui ne répond pas justement ; il ne répondra jamais, il ne rendra jamais gorge, moi, le « plus un » ça m’évoque, comme ça, le « plus de jouir ».

Il y a une question qui me paraît importante et qui n’a pas été posée, c’est la question du travail. Je ne veux pas trop approfondir ce problème. J’ai entendu cette expression : « Il faut produire ». Il ne me semble pas qu’on peut résoudre cette question du « un en plus », quoique (228)ce soit, d’ailleurs, que ce soit incarné ou pas incarné, sans s’interroger sur le problème du travail, de pourquoi on travaille, avec la relation que ça a au désir et à la jouissance.

Ce sont des remarques.

 

Guy Laval – Je voudrais parler d’un cartel qui existe depuis très peu de temps, qui est issu d’un séminaire de Clavreul, je dis bien : qui est issu, ce qui montre qu’il y a eu une nécessité, à partir d’un certain moment. Le séminaire s’en allait comme ça, se décousait de plus en plus. Ça ne tenait plus, on peut dire, finalement, à un moment s’est montrée la nécessité de constituer quelque chose d’autre ; ça a reçu le nom de cartel, et en ce qui me concerne personnellement je voulais travailler dans un cartel et la première nécessité qui s’est imposée à moi c’est, je ne l’appelais pas le « plus une » mais il me semble que c’est de cet ordre-là, la première nécessité, c’était d’avoir dans le cartel où je serai, une personne sur qui je puisse m’appuyer pour parler.

C’était pour moi, peut-être, la première fonction « plus une », mais Clavreul m’a coupé l’herbe sous le pied en me désignant comme responsable de cartel, responsable et pas leader, il l’avait bien précisé puisqu’il s’agit d’un cartel sur les entretiens préliminaires et que j’avais fait un exposé là-dessus. Étant désigné, du coup je n’avais plus, moi, cet appui dont j’avais besoin dans un cartel.

Mais ça ne veut pas dire qu’il n’y ait pas une certaine nécessité qui restait justement et il me semble que cette nécessité découlait même du malaise que nous éprouvions tous devant l’effilochage, on peut dire, du discours dans les derniers temps, de ce séminaire.

Les premières réunions du cartel sur les entretiens préliminaires ça a continué à être un peu l’effilochage, d’ailleurs, c’était comme si il y avait une certaine suite de cette nécessité et le premier nom qu’on peut donner à cette nécessité c’est nécessité de formulation, je crois. Il se trouve que dans un cartel très facilement, on parle ensemble, puisque c’est plus facile, on est moins nombreux, on se met à parler plus facilement mais ça peut aboutir à rien du tout ça peut aboutir au fait qu’on se rencontre entre copains, qu’on s’aime bien et qu’on peut se parler ensemble, mais il me semble que la première nécessité et ce serait peut-être aussi de l’ordre du « plus une » c’est une nécessité de formulation, formulation qui peut être écrite, formulation qui peut être transmise par exemple à un autre cartel. On en a parlé d’ailleurs, qui peut être transmise au grand groupe qui peut-être pour cela peut se reconstituer de temps en temps, et il me semble que ça va un peu plus loin vers quelque chose que je ne sais pas très bien articuler, que vous avez appelé le mathème. C’est-à-dire qu’il me semble que très facilement un cartel ça peut très bien constituer une espèce de petit groupe ésotérique finalement qui ne rende compte de rien, qui n’ait à rendre compte de rien.

Il me semble que ce que vous avez articulé comme le mathème peut aussi rendre compte de cette nécessité du « plus une » dans un cartel.

 

Roudi Gerber – Je voudrais apporter une analogie que je tirerai de l’alpinisme : quand on a trois prises on peut à la rigueur rester sur ces trois prises pour finalement s’épuiser et mourir.

La quatrième prise permet le passage et oblige au passage, c’est-à-dire que dès qu’on a la quatrième prise, on est obligé d’aller au-delà et je me demande si le « plus un » n’est pas celui à qui le cartel demande de pouvoir témoigner de ce passage.

 

Jacques Lacan – Je suis là pour une fonction tout à fait précise, ce serait cette chose que j’ai écrite et dont bien sûr personne ne s’est aperçu, parce qu’elle n’est jamais qu’un grafouillage : le mettre en quelque sorte sur ce que vous représentez de place publique, et de vous y intéresser, si je puis dire. Je veux dire par là qu’après tout il vous viendra peut-être à l’idée déjà que c’est une question. C’est une question bien sûr que je ne pose que parce que j’en ai la réponse et j’essaierai de vous la dire dans ce qui viendra par la suite ; je veux dire le plus vite possible, bien sûr ; je n’ai pas encore tellement de séminaires devant moi cette année ; donc je vais essayer de le faire.

(229)Mais je trouvais pas mal que la question soit présentifiée dans l’École parce que ça peut être considéré comme ce que je voulais en faire par ce texte comme quelque chose de tout à fait nodal pour la formation d’un petit groupe, le fait qu’il soit petit est tout à fait essentiel, il est essentiel à son fonctionnement ; si j’ai dit que ça ne pouvait pas aller au-delà de six, c’est pour les meilleures raisons, c’est pour des raisons théoriques mais tout à fait profondes, l’entreprise d’un groupe très large comporte en soi-même des limitations telles, c’est ce que je pense tout au moins, qu’il n’y a pas grand chose à en attendre pour un progrès réel sur les effets de l’analyse.

C’est ça qui m’a inspiré quand j’ai fait cet Acte de fondation et auquel après tout je n’ai aucune raison de penser que vous deviez être par principe résistants, je ne vois absolument pas ce qui pourrait motiver cette résistance, surtout si ce que j’ai essayé d’obtenir d’un certain nombre que je remercie tous également, ce que j’ai essayé d’obtenir d’un certain nombre : le mettre à l’ordre du jour.

Il y aura une réunion demain matin qui va continuer celle-ci.

(La séance est levée).